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Bible, Histoire, Archéologie

Bible,
Histoire,
Archéologie

Introduction

De nombreux sceaux anciens ont été mis au jour au Proche-Orient. Ils sont généralement façonnés dans du calcaire, en pierre semi-précieuse, ou encore en os, en verre, en bronze et même en argent.
Bien des sceaux ont été sertis dans des bagues, habituellement incisées au nom de leur propriétaire, les sceaux étaient ainsi utilisés pour identifier, authentifier et protéger le contenu des documents.

La fabrication d’un sceau

Parce que la plupart des sceaux étaient pressés dans de l’argile humide pour former des bulles utilisées pour fixer les rouleaux – servant de signature – les symboles et les lettres étaient gravés à l’envers. Lorsqu’ils étaient estampés dans l’argile, les images du sceau et l’inscription apparaissaient correctement.

Les deux images, ci-contre, montrent le sceau gravé à l’envers, et son impression dans sa face normale de lecture. © Musée d’Israël, Jérusalem.

À qui pourrait appartenir ce sceau ?

Ce sceau porte le n° 740 du Corpus of West Semitic Stamp Seals de Nahman Avigad and Benjamin Sass (Jérusalem, 1997).
Orné de symboles et de lettres, ce sceau de pierre appartenait sans aucun doute à un membre de la haute société. Il faisait partie d’une collection privée qui a été donnée au Département des Antiquités d’Israël au début des années 1960. Sa taille inhabituellement grande (environ 3,2 cm) et les symboles égypto-phéniciens communs de la royauté et de la divinité suggèrent fortement qu’il devait appartenir à un roi ou à une reine.

Image ci-contre : le sceau dit de « Jézabel » du Corpus of West Semitic Stamp Seal de Nahman Avigad and Benjamin Sass. © BAR.

Sa description

Le sceau porte quatre lettres (YZBL) insérées entre les images. Bien que certains spécialistes reconnaissent depuis longtemps la similitude de l’inscription avec le nom de Jézabel, ils se sont généralement abstenus d’établir un lien avec la triste et célèbre épouse phénicienne du roi israélite Achab (1 et 2 Rois).

Images ci-contre : image à gauche avec la proposition des lettres endommagées.
Image à droite avec les lettres insérées (YZBL) déjà existantes sur le sceau. © BAR.

Avec la reconstruction de deux lettres supplémentaires (L’) dans la zone endommagée en haut du sceau, la professeure Marjo C. A. Korpel de l’Université Théologique Protestante d’Amsterdam soutient que l’inscription devrait probablement être lue à l’origine L’YZBL, ou « (appartenant) à Jézabel » et donc pourrait bien être le sceau personnel de la reine mentionnée dans la Bible.
De tous les milliers de sceaux mis au jour avec des inscriptions hébraïques, seuls 35 exemplaires environ appartenaient à des femmes.

Une identification controversée

En réponse à un article paru dans le quotidien Haaretz anticipant la publication du sceau de Jézabel par la revue Biblical Archaeology Review (BAR n° Mars/avril 2018), le paléographe Christopher Rollston de l’Emmanuel School of Religion a écrit que l’identification par la professeure Marjo Korpel du sceau comme étant celui de la reine Jézabel n’est pas « tenable ». Selon le professeur C. Rollston, l’écriture sur le sceau ne peut pas dater du neuvième siècle avant J.-C. ; il doit être plus tardif et, par conséquent, après l’histoire de la reine biblique. Cependant, d’autres spécialistes estiment, pour leur part, que le sceau et son inscription pourraient bien dater du neuvième siècle avant J.-C.

Réponse du professeur André Lemaire

Directeur d’études à l’EPHE où il enseigne la philologie et l’épigraphie hébraïques et araméennes. Spécialisé dans la civilisation ouest-sémitique ancienne et les origines du monothéisme, il est membre correspondant de l’Académie des inscriptions et belles-lettres.

« Ce sceau pose beaucoup de problèmes d’identification : dans le corpus, il est présenté comme phénicien incertain. En fait, on hésite entre israélite (royaume du Nord) et phénicien. La date ne peut être que très approximative : fin du IXe – VIIIe siècle avant notre ère.
Il est vrai qu’il y a eu un ou deux articles pour proposer de l’identifier avec Jézabel, épouse du roi d’Israël, Achab, mais c’est peu vraisemblable car elle est morte vers 841 avant notre ère, lors du coup d’État de Jéhu, apparemment antérieurement à la datation probable de ce sceau. En fait, on ne connaît aucun sceau ouest-sémitique inscrit contemporain de Jézabel. La plupart des spécialistes rejettent donc cette identification. ».

Image ci-contre : quelques sceaux antiques exposés au Musée d’Israël à Jérusalem. © Musée d’Israël, Jérusalem.

Jézabel selon la Bible

Jézabel (hébreu : איזבל, Izével) est une princesse d’origine phénicienne, fille d’Ethbaal Ier, prêtre d’Astarté, roi de Tyr et de Sidon (1 Rois 16,31 ; Contre Apion 1,18). Elle a été l’épouse d’Achab roi d’Israël (royaume du Nord) qui régna environ de 874 à 853 avant J.-C.

Image ci-contre : Human-Ram, divinité de Sidon. Avec des traits humains ainsi que les sourcils, le nez et les cornes d’un bélier, cette figurine en calcaire peint représente une divinité et date de 1650 avant notre ère (l’âge du Bronze moyen). © Claude Doumet-Serhal.

Son histoire est narrée dans la Bible, aux Premier et Second Livres des Rois de l’Ancien Testament. Elle y est présentée comme une étrangère malfaisante qui incita le roi et le peuple à se détourner du culte de l’Éternel en imposant, par la force dans le royaume de Samarie, les divinités de Baal et l’Astarté phénicienne (1 Rois 16, 32-33). Elle s’efforce de faire mettre à mort le prophète Élie le « Tischbite » (1 Rois 19, 1-2) qui, victorieux lors d’un affrontement contre 450 prophètes de Baal et 400 prophètes d’Astarté (1 Rois 18, 1-40), s’oppose à elle.
Onze ans environ après la mort d’Achab, elle subit un terrible sort : sur ordre de Jéhu, elle est défenestrée, foulée aux pieds par des chevaux et son corps dévoré par des chiens après son ensevelissement (2 Rois 9, 7, 30-37).