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Le code de lois d’Hammourabi

Introduction

Cette stèle en diorite, de 225 cm de haut, pesant près de quatre tonnes a été retrouvée à Suse (Iran), brisée en trois fragments, lors de fouilles menées par la mission archéologique française de Jacques de Morgan. Le monument, datant de la fin du règne d’Hammourabi (1792-1750 av. J.-C.), fut razzié au XIIe siècle avant J.-C. par le roi d’Elam Shutruck Nahunte.

Le révérend père dominicain Jean-Vincent Scheil (1858-1940), archéologue et assyriologue français. Célèbre pour avoir traduit les inscriptions de la stèle du Code d’Hammourabi, en Iran. Image domaine public.

L’œuvre de législateur d’Hammourabi a fait de lui une des figures les plus célèbres de l’Orient antique. Le texte fut traduit dès 1902 par le Père Scheil.

Image ci-contre : une inscription du nom d’Hammourabi incisée sur une pierre, à gauche, la pièce originale, à droite la retranscription.
© Museum of Art de New York (MET).

Description

La stèle, aujourd’hui exposée au musée du Louvre, est taillée dans un bloc de diorite, pierre bénéficiant d’une valeur particulière de par sa dureté et son origine lointaine (actuel sultanat d’Oman) qui garantissait l’intégrité du monument et de l’image du souverain.
La plus grande partie de la surface de la stèle est couverte par un texte gravé en écriture monumentale, très élégante. Seul le sommet porte un bas-relief qui illustre le thème de la présentation du souverain devant son dieu. D’après les flammes qui jaillissent de ses épaules, il s’agit de Shamash, le dieu-soleil personnifié, patron de la justice. Il siège sur un trône dont le côté est la représentation stylisée d’une façade architecturale avec alternance de pilastres et de niches ; ses pieds reposent sur trois rangées d’écaille, symbole des montagnes orientales sur lesquelles il se lève chaque matin, il tient dans ses mains la baguette de la justice et l’anneau, attributs de la divinité et du pouvoir, qu’il tend vers le roi ; sa tiare comporte plusieurs paires de cornes tandis que son corps est enveloppé dans le manteau traditionnel à volants. Le visage du dieu est peu expressif et tous les détails, boucles de la barbe, mèches des volants de la robe ont été estompés de manière à donner à l’ensemble plus de majesté.

Image ci-contre : le code de lois d’Hammourabi, avec en arrière-plan le musée du Louvre. 2,25 m de haut sur 1,90 m de circonférence. © Images et montage Théo Truschel.

Hammurabi, quant à lui, est coiffé du bonnet à haut rebord de la tradition sumérienne, il porte une longue robe drapée, aux plis à peine esquissés, dépourvue de broderie, mais à bordure galonnée. Il se tient dans une attitude hiératique, il ne touche pas les emblèmes que lui tend le dieu, mais lève une main devant la bouche, attitude classique du fidèle en prière en Mésopotamie que l’on observe déjà sur le sceau de Goudéa, prince de Lagash. Le rendu conventionnel du personnage ne permet pas d’y voir un portrait personnel du roi.
Sous le règne d’Hammurabi on assiste à l’éclipse des vieilles divinités agraires de Sumer, dont le culte était lié à la fertilité, au profit de divinités à caractère astral, tels Shamash à Sippar, Ishtar, déesse de l’amour et de la guerre identifiée à l’astre Vénus, Adad le dieu de l’orage ou encore Marduk à Babylone.

Image ci-contre : Le sommet de la stèle représentant Hammourabi, à gauche, et face au roi, Shamash, le dieu-soleil personnifié, patron de la justice. Musée du Louvre, Paris. © Théo Truschel.

Shamash est le dieu du soleil et, à l’origine, l’idéogramme qui le représentait était un soleil levant entre deux montagnes ; progressivement il apparaît sous une forme humaine et devient le garant de l’équité et de la justice sociale ; c’est la raison pour laquelle le roi se fait représenter en sa présence, ainsi qu’il le dira dans le prologue de la stèle.

Le reste de la stèle est composée d’une inscription en 28 colonnes de 282 « articles de loi », ou plutôt des sentences formulées de manière juridique. Elle comporte un prologue et un épilogue à la gloire du roi et les articles de loi. Le texte n’est pas rédigé en sumérien, mais dans la langue des Sémites d’Akkad, l’akkadien étant devenu la langue diplomatique au IIe millénaire avant J.-C. ; l’écriture est cunéiforme, avec une graphie extrêmement soignée. La stèle a sans doute été érigée à Sippar, cité de Shamash, dieu-soleil et dieu de la justice. Ce type de document n’est pas le plus ancien puisque l’on a retrouvé un recueil des arrêts de justice d’Ur-Nammu (XXIe siècle avant J.-C. fondateur de la IIIe dynastie d’Ur) ou bien le code du roi d’Isin Lipit Ishtar, rédigé en sumérien (XIXe siècle avant J.-C.).

Différentes illustrations sur des scènes des empires akkadien et sumérien : roi en char, lion et guerrier, scène de combat. © matrioshka 1549413956.

Les origines du royaume d’Avaris

Situation dans le delta du Nil à la fin du IIIe millénaire et dans la première moitié du IIe millénaire :
Cette période est l’une de plus mal connue de l’histoire pharaonique ; se succèdent deux monarchies unitaires, celle d’Héracléapolis et celle d’Ititaouy toutes deux disposant de peu de moyens sur un territoire réduit ; en fait ces monarchies paraissent divisées en de nombreux petits pouvoirs locaux plus ou moins hiérarchisés, et c’est ainsi que les rois d’Avaris semblent avoir été prépondérants dans le delta.

En tout cas, c’est à la fin du IIIe millénaire que le rôle de carrefour de Tell El Daba/Avaris s’affirma ; les fouilles montrent que les pharaons d’Héracléapolis y avaient fondé une centre-hout (logistique et militaire) là ou se croisent des routes maritimes, fluviales et terrestres, de même que ceux d’Ititaouy (présence d’agents royaux chargés des unités de mesure et de la « maison de Byblos ») ; c’est à Avaris qu’aboutissait « le chemin d’Horus » voie terrestre reliant le port à la région de Gaza, 200 km à travers le Sinaï. Bien des éléments montrent des contacts très étroits et réguliers avec les principautés du Levant et leurs populations : on a ainsi découvert un temple de plan levantin à Tell Ibrahim Awad,  et de la céramique du Sinaï et du Néguev à Tell el Daba.

 

Image ci-contre : fouilles à Tell el Daba. Début des travaux dans la zone F/I à l’automne 1979 © M. Bietak / ÖAI.

Il semble cependant que pendant toute cette période, le delta soit resté une région d’habitat dispersé avec des villes en déclin, traversé par des pasteurs et des populations indépendantes venues du Levant ou de Libye, exerçant l’agriculture et l’élevage à partir de campements saisonniers. Ils pratiquaient aussi le trafic de minéraux comme la galène (pour le khôl et la teinture noire), le cuivre ou la turquoise des mines de Sérabit el Kadim dans le Sinaï. Et la réalité de ces échanges apparait sur les murs des tombes de Béni Hassan en Haute Égypte où sont représentés de nombreux orientaux… d’autre minéraux venaient parfois de beaucoup plus loin comme l’étain (pour la fabrication du bronze) ou le lapis-lazuli depuis l’Afghanistan à travers l’Iran, la Mésopotamie et le Levant. À cette période, un réseau d’échanges est en plein essor reliant l’Asie à l’Afrique, la Méditerranée à l’Océan Indien.

Image ci-contre : un diadème en or d’un roi d’Avaris mise au jour lors de fouilles archéologiques. © Metropolitan Museum of Art de New York.

Une autre marque de la présence de populations asiatiques est la découverte de nombreuses « tombes de guerriers » dans l’arc de cercle du Sinaï au delta occidental ; il s’agit d’inhumations, parfois sous tumulus, de guerriers levantins accompagnés d’une riche panoplie d’armes et d’un ou plusieurs ânes enterrés à l’entrée des tombes, l’âne étant encore à cette époque, l’animal utilisé par les guerriers et les commerçants. Enfin on commence à constater, dans des inscriptions, la description de maisonnées dont une partie était égyptienne et l’autre « asiatique » et dont le mode de vie est égyptien. Certains de ces levantins sont vraisemblablement des prisonniers ramenés en Égypte, mais pour beaucoup il s’agit d’artisans, commerçants, interprètes, marins, soldats, chefs de caravanes, formant une société multiculturelle basée sur le commerce et les échanges. C’est de ce terreau singulier et non d’une invasion de la région que le royaume d’Avaris tire ses origines.

Fresque minoenne reconstituée à partir des débris retrouvés sur le site d’Avaris, en Égypte. Aujourd’hui exposée au Musée archéologique Iraklion, Crète, Grèce. Licence sous CC-BY-SA-2.5.
Elle date de la XVIIIe dynastie d’Égypte, probablement sous les règnes des pharaons Hatchepsout (règne vers 1479 – 1458 avant notre ère) ou de Thoutmôsis III (règne de 1479 à 1425 avant notre ère), après avoir été précédemment considérées comme appartenant à la fin de la Deuxième période intermédiaire. Les peintures indiquent une implication de l’Égypte dans les relations internationales et les échanges culturels avec la Méditerranée orientale, soit par le mariage, soit par l’échange de cadeaux. @ Martin Dürrschnabel, Benutzer : Martin-D1,

âge d’or d’Avaris

Alors que la monarchie d’Ititatouy s’efface progressivement, deux royaumes émergent au XVIIIe et surtout au XVIIe siècle avant J.-C. L’un est guerrier, centré autour de Thèbes, l’autre est commerçant autour d’Avaris, sa capitale dans le delta oriental. Tant que les deux royaumes furent séparés par les marécages de la Moyenne Égypte, ils ne se confrontèrent pas.

Image ci-contre : fresque minoenne reconstituée d’Avaris/Tell el-Daba aujourd’hui au musée archéologique d’Héraklion, Crète. @ Musée archéologique d’Héraklion, Crète.

Le site portuaire de Tell el Daba voit s’établir une colonie de marins, de marchands, de constructeurs de navires venus du Levant ; leur présence devient tellement importante qu’apparait sur place une culture originale où se mêlent des éléments égyptiens et levantins : ainsi on trouve des inhumations au sein même des habitations, ce qui est une pratique « asiatique » ; la taille des sanctuaires, des palais, des bâtiments augmente tandis qu’apparaissent dans les palais des salles de banquets qui réunissaient les alliés du roi.
Par ce site transitaient les importations venues ou à destination des mondes égéens (Chypre) et levantins (dont Byblos, relais important vers Mari et la Mésopotamie) : on a retrouvé deux millions d’amphores pour l’huile et le vin à Tell el Daba ; Les échanges s’effectuaient aussi vers la Haute Égypte, la Nubie et le royaume de Kerma. La richesse de Tell el Daba est incontestable selon les inscriptions même de son vainqueur le roi Kamosé : « des centaines de bateaux chargé d’or, d’argent de lapis lazuli, de turquoise, de haches de bronze, d’encens, de bois précieux et d’huiles parfumées, tous les beaux produits du pays de Retenou (= Canaan). »

Image ci-contre : un sceau de Khayan, un des derniers rois d’Avaris.

La ville de Charouhen, de l’autre côté du Sinaï, au sud de Gaza semble être l’autre grand centre du royaume : elle se situe au débouché des routes de caravanes du pays de Canaan et de l’est du Jourdain, elle est donc au centre des réseaux d’échange, une porte d’entrée vers l’Égypte.

La liste des rois d’Avaris et la durée de leur règne pose des problèmes insolubles, car on ne peut se fier aux listes de Manéthon. Le roi le mieux attesté pour le début de la période est Néhésy Ier (« le Nubien ») nom qui peut s’expliquer par les liens commerciaux avec la Nubie (sceaux retrouvés près de la Deuxième cataracte) ; on a par ailleurs la liste d’une cinquantaine de rois dont on ignore pratiquement tout, certains portant des noms sémitiques qui trahissent leur origine levantine, plusieurs sceaux ayant été retrouvés sur des site cananéens.
La dynastie des Hyksos semble avoir régné une centaine d’année en Égypte (vers 1650/1539).

Image ci-contre : tête du pharaon Ahmosé exposé au Metropolitan Museum of Art de New York @ Keith Schengili-Roberts.

Le règne de Khayan (1610/1580), un des derniers rois d’Avaris, est le moins mal documenté ; son palais a été identifié, avec son mobilier et ses salles de banquet ; le cartouche de ce roi a été retrouvé en Babylonie, en Anatolie centrale et en Crête. Apophis serait quant à lui parvenu à s’étendre sur la Moyenne Égypte durant la première moitié du XVIe siècle en s’emparant de Memphis ; le dernier roi d’Avaris, Kamoudi, fut renversé par le pharaon Ahmosé (vers 1550/1525 avant J.-C.).

L’affrontement avec Thèbes et la fin du royaume d’Avaris

Jusque là séparés par les marécages de la Moyenne Égypte, les relations entre les deux royaumes ne cessent de se dégrader avec la prise de Memphis par le roi d’Avaris Apophis. Les Thébains désirent se libérer des « servitudes » imposées par les Avarites. Dans le texte de « la guerre de l’an 3 » le pharaon déclare « on ne peut s’arrêter sans être pressurés par les impôts des Asiatiques… » ; en fait les Thébains voulaient pouvoir accéder directement à la Méditerranée et au trafic avec le Levant. Le prétexte trouvé fut que Kamosé voulait être reconnu comme un « Grand » par son voisin qui héritait du simple titre de « prince », donc un inférieur. Dès lors Kamosé (1555/1550) se lance à l’attaque d’Avaris avec son armée appuyée par une flotte ; Il parvient semble-t-il à un accord avec les Hyksôs qui quittent Avaris avec leurs armes et se replient de l’autre côté du Sinaï. C’est alors que les opérations militaires furent assimilées à une lutte « nationale » contre une puissante armée d’occupation « asiatique » : c’est le mythe des Hyksôs qui est mis en place par les Thébains, seuls « véritables » égyptiens.
Quelques années plus tard, alors que Kamoudi avait repris la ville depuis Charouhen, le pharaon Ahmosé (1550/1525) vient faire un second siège d’Avaris, il parvient à s’emparer de la ville qui subit un pillage en règle avant d’être livrée aux flammes ; le pharaon franchit le Sinaï et s’empare aussi de Charouhen. C’est la fin définitive de la monarchie du nord.

La prise d’Avaris permet aux Thébains d’accéder maintenant directement au commerce du Levant et de la Méditerranée ; ils marquent leur emprise par la construction d’un nouveau palais et disposent désormais de ressources financières et territoriales pour affirmer leur volonté de puissance.
C’est avec Khamosé que commence le Nouvel Empire et ses conquêtes.

La scène la plus célèbre de la tombe de Khnoumhotep II (tombe BH3), l’une des plus belles de Beni Hassan. Khnoumhotep y raconte l’histoire de sa famille, expliquant les fonctions importantes qu’elle a exercées et sa propre administration du nome ; il évoque ses enfants ainsi que la construction de son tombeau. La scène la plus célèbre est celle de l’arrivée des « Asiatiques », en la sixième année du règne de Sésostris II.
Les deux versions : celle du dessus, en l’état aujourd’hui (cette fresque se dégrade d’année en année), et celle du dessous, reconstituée sur ordinateur. © Montage Théo Truschel.

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